Je vais vous parler d’un truc que j’appelle responsabilité collective. Je ne sais pas si c’est un concept qui existe vraiment, s’il a un autre nom ou quoi ou qu’est ce, mais en tout cas, c’est comme cela que je le nomme.
C’est une notion que j’ai découverte en colonie de vacances alors que j’avais moins de 10 ans. Je n’ai évidement tout de suite pas bien compris, ni même saisi à quel point cela allait influencer ma vie et ma façons de penser. Nous étions dans des “box” de quatre enfants avec chacun son lit, un petit couloir et une petite armoire pour ranger ses affaires. Nous devions garder l’endroit un minimum propre et rangé. Une à deux fois par semaine, il y avait une inspection pour voir si ce minimum avait été atteint. Et il arrivait régulièrement que cela ne soit pas le cas. C’est alors que tout le “box” de quatre devait subir les conséquences de non vigilance, d’un ou plusieurs. Par exemple si une armoire n’était pas bien rangée, il était possible de voir les quatre armoires vidées par terre à re-ranger. Si un lit n’était pas fait correctement, c’est les 4 paires de draps qui passaient par la fenêtre et qu’il fallait ramasser dans le sable de la pinède. Injuste ?! On pourrait le penser. Mais il était de notre responsabilité collective de faire en sorte que le minimum de rangement soit fait. Qu’aurait je pu faire pour que mon copain de “box” range mieux sous son lit ou son armoire ? J’aurais pu l’avertir qu’il y avait trois paires de chaussures sous son lit, j’aurais pu l’aider à plier sa pile de t-shirt dans son armoire. On aurait du s’organiser, s’entraider. Peut être que ma partie était nickel, mais qu’ai je fais ou pas fais pour aider mon copain. La prochaine fois, quel copain pourrait il m’aider à ranger mes affaires pour me rendre la pareille ? C’est ça la responsabilité collective. Démerdez vous, mais vous devez être capable de vous organiser pour que ça roule. Que ce soit en cas de réussite ou d’échec, ce n’est pas la peine non plus d’endosser plus de responsabilité que nécessaire. La responsabilité est collective dans les deux cas. On pourra toujours s’attarder sur des erreurs ou des prouesses individuelles, mais cela est souvent le fruit de comportement collectif.
Vous avez peut être remarqué que la dernière phrase pu le sport collectif et/ou le football. En effet, la colonie où j’ai découvert ces concepts (bien qu’il n’ait jamais été explicitement cité) était également un stage de foot. Et l’application de la responsabilité collective dans les sports collectifs est une évidence ou au moins un passage évident, et obligatoire, d’après moi. Il se trouve que j’ai aussi été entraineur de foot, de gamins entre 7 ans et 11 ans. Si on prend l’exemple, d’un but encaissé, même s’il est facile d’accuser vite fait le défenseur qui a fait l’erreur, chacun de ses coéquipier pourra toujours se demander ce qu’il a fait ou pas pour qu’on ne prenne pas ce but. L’attaquant pourra se demander s’il a fait suffisamment d’effort pour se replacer pour empêcher la relance adverse, ou s’il n’avait pas raté son dribble et perdu la balle est ce que cela aurait été pareil. Bref, on peut questionner chaque joueur, même celui qui est le plus éloigné de l’action qui amène le but, pour savoir ce qui aurait pu être fait pour que le défenseur qui a fait l’erreur soit dans de meilleurs dispositions et ne fasse pas cette erreur. Mais ce n’est pas a posteriori que la notion de responsabilité collective est la plus intéressante, car ces analyses sont du ressort du coach. C’est dans le jeux, à tout les instants. Qu’est ce que je peux faire pour aider mon partenaire, pour le mettre dans des bonnes conditions de récupérer ou de donner la balle. Si mon partenaire a pris un risque, comment je peux protéger son risque pour le bien de l’équipe. Il est de la responsabilité de l’équipe de gagner ce match. Et quand bien même, un de mes partenaires fait une erreur manifeste que ce soit devant notre but pour un défenseur, ou devant le but adverse pour un attaquant, on doit se montrer solidaire. Chacun d’entre nous, partenaire fera des erreurs, un jour ou l’autre. Et nous avons besoins des uns et des autres pour nous soutenir dans ces moments là, et passer au dessus de cette erreur. Il en va de la bonne marche de notre équipe.
Une fois tout cela digéré, j’ai pu mettre un nom sur cette notion que j’utilisais, vivais sans la connaître, j’ai pu aller un cran plus loin. Tout bêtement, dans les médias qui taquine le football, on évoque souvent la notion de groupe : “le groupe vit bien”, “c’est un bon groupe”, etc. Même si j’avais une idée de ce que ce groupe pouvait bien signifier, il a prit un sens encore plus fort quand je l’ai mis en perspective avec la responsabilité collective. Un groupe qui vit bien est un groupe où chacun est prêt à faire des efforts pour l’autre, et pour le bien de l’équipe, où la collectivité prime sur l’individu, et où la responsabilité collective est assumée par tous. Cela peut se constater, et se vivre en dehors du terrain comme sur le terrain. Et c’est une condition sine qua non de la réussite d’une équipe. Et c’est avec cet éclairage supplémentaire qu’il peut être intéressant d’analyser les choix de différents entraineurs et sélectionneurs connus d’Aimet Jacquet à Didier Deschamps par exemple.
Sans en avoir bien conscience, j’ai ce concept de responsabilité collective chevillé à la conscience depuis mon plus jeune age, et il m’a accompagné depuis tout ce temps. Je me suis également rendu compte qu’on pouvait le vivre dans des domaines bien plus communs que simplement les sports collectifs : à travers une équipe de projet en entreprise, une association, un groupe d’amis, une collocation, avec son ou ses enfants, et même quand le groupe est réduit à 2 personnes comme dans un couple. Dans chacune de ces situations, on peut se demander ce qu’on peut faire pour apporter son soutien aux autres membres du groupe, comment faire pour que les membres de mon groupe, de ma famille de mon couple soient dans les meilleurs dispositions dans leurs quotidien et encore plus pour effectuer des tâches exceptionnelles, mener à bien des projets et se dépasser. Mais surtout on doit être prêt à assumer collectivement les erreurs, les colères, les humeurs des uns et des autres, sachant qu’on en est en partie responsable.